Guinée: le  chômage des jeunes n’a jamais été au centre des priorités de l’État

La lutte contre le chômage des jeunes n’a en réalité jamais fait partie des priorités et préoccupations de l’État guinéen. 

Or les jeunes constituent la couche sociale la plus importante de la population guinéenne (54 %) et ils sont les moins chers sur le marché du travail, et malheureusement les plus touchés par le chômage (30%).

Mais qu’est ce que le chômage? 

Selon l’Organisation internationale du travail (OIT),« le chômage est la situation de la main-d’œuvre disponible à travailler qui est à la recherche d’un emploi mais ne réussit pas à en trouver. La définition du chômage et de ce qu’est la main-d’œuvre disponible à travailler varie toutefois selon les pays ». 

Les causes du chômage varient d’un pays à un autre et dépendent surtout de l’engagement, la volonté politique du gouvernement en place. 

En ce qui concerne la Guinée, le chômage des jeunes Guinéens dépend surtout de l’instabilité politique, des crises institutionnelles récurrentes accompagnée du ralentissement récent de la croissance économique, la faiblesse des politiques adaptées aux préoccupations des jeunes, l’inadéquation entre la formation et les besoins de l’économie guinéenne. 

Ces facteurs ont contribué à exacerber le chômage et le sous-emploi de la nouvelle génération.

L’arrivée de la junte militaire au pouvoir le 05 septembre 2021 incapable de mettre fin à la crise politique continue d’amplifier le chômage des jeunes. 

Elle a plongé l’État guinéen dans un dirigisme étatique, dans un gangstérisme d’État et d’instabilité politique rendant même l’accès à l’eau, l’électricité, l’accès à internet impossible pour la population. 

Des solutions de luttes contre le Chômage des jeunes existent

En ma qualité de conseillère à la politique de l’emploi et de développement de stratégie de lutte contre le Chômage en Allemagne depuis 16 ans, je suis convaincue que les solutions pouvant créer l’emploi des jeunes en Guinée existent. 

Et la Guinée de demain, dans la prospérité et la solidarité, passe par une transformation sociale, économique et structurelle qui s’articule autour de la bonne gouvernance pour une économie durable et dynamique pouvant créer des emploi pour les jeunes. 

Car la création de l’emploi pour les jeunes peut redonner espoir à la jeunesse guinéenne, empêcher l’immigration mortelle, la fuite des cerveaux… 

Mais à condition qu’elle soit une priorité gouvernementale. 

Car l’emploi des jeunes n’a jamais été une préoccupation majeure des dirigeants guinéens. 

Et leurs échecs dans ce domaine est plus que cuisant.

Vue d’ensemble 

La crise de l’emploi-jeune s’est amplifiée ces dix dernières années. 

Une situation qui pousse aujourd’hui les jeunes guinéens en manque de perspectives et de soutien de l’État à prendre désespérément le chemin de l’immigration mortelle. 

Le pouvoir politique a cultivé sans gêne la culture de la dépendance et de la mendicité dans la société guinéenne. 

Une mentalité qui impacte très sérieusement la construction sociale des jeunes en Guinée.

En effet, la mentalité du travail ou celle du dur labeur a été, de nos jours, remplacée par l’esprit de facilité, de mendicité, la culture de l’assistanat et de l’oisiveté dans la société guinéenne. Et c’est d’ailleurs l’une des raisons pourquoi chacun veut faire de la politique en Guinée. 

Car chaque médiocre, assidu des réseaux sociaux, imposteur, chaque fainéant, chaque transhumant politique et déflaté de la diaspora peut de surcroît se lancer en politique ou être parachutés dans le gouvernement. 

Et tout, incompétent flatteur peut avoir un poste ministériel. 

Ils sont aujourd’hui très nombreux au sein des rouages du pouvoir militaire de Conakry dirigé par Mamadi Doumbouya, Amara Camara, Balla Samoura, Sidiki Camara. 

Ce groupe n’a aucun sens sain de l’orgueil collectif permettant de déboucher sur des résultats constructifs. Ce clan souffre d’un narcissisme collectif qui est la base du fascisme et de ses méthodes d’imposition et de contrôle.

Or pour mettre fin à ces fléaux, il faut faire comprendre à la jeunesse guinéenne que l’État guinéen doit impérativement se construire autour de l’idée que «l’identité sociale d’une personne se fait par le travail. Je suis quelqu’un parce que j’ai un métier». 

L’Allemagne maîtrise le chômage des jeunes 

Et d’ailleurs c’est cette mentalité qui fait entre autres qu’en Allemagne, le taux de chômage des jeunes de (15-24 ans) est le plus bas d’Europe. 

Il est à 7,1%, près de trois fois inférieur à son équivalent français.

Et partout en Allemagne se trouvent des agences pour l’emploi des jeunes (Jugendberufsagentur) différents des centres de chômage (Jobcenter). 

Et ces agences conseillent et  soutiennent les jeunes allemands dans les domaines suivants:

  • Trouver un métier, une formation appropriée, ou des études convenables.
  • Elle les assiste lorsqu’ils ont des problèmes à l’école ou pendant leur formation.
  • Lorsqu’ils cherchent la voie de la scolarisation appropriée afin qu’ils puissent surmonter leurs difficultés personnelles.

Alors de la formation des jeunes à l’aide accordée aux chômeurs en passant par les emplois dits «atypiques», le système allemand vise à garder les personnes en emploi. 

Durant leurs études, plus de la moitié des étudiants allemands découvrent par exemple rapidement l’entreprise en effectuant un apprentissage, leur permettant d’être plus attractifs sur le marché du travail. «Les jeunes sont qualifiés, travaillent tôt et sont autonomes ». 

Ils existent aussi pour les futurs entrepreneurs, des centres de chômage spécialisés dans ce domaine où ils peuvent trouver assistance et financement pour leurs projets entrepreneuriaux.

Un programme possible en Guinée

Cela peut paraître irréalisable en Guinée. Mais, en me basant sur mon expérience et expertise de conseillère à la politique de l’emploi et développement, de stratégie de lutte contre le chômage en Allemagne, c’est possible de se référer de cette politique pour inverser la donne en Guinée. 

Il faut cependant commencer par relever les échecs de nos Gouvernants en matière de politique d’emploi en passant par: 

  • l’éducation et la formation tout au long de la vie;
  • assurer l’adéquation entre la formation et l’emploi;
  • la mise en place d’un dispositif d’appui ciblé à l’auto-emploi en vue de la réduction du sous-emploi et de la migration du secteur informel vers le secteur formel;
  • assurer l’égalité dans l’emploi tout en promouvant une discrimination positive. 

Par ailleurs, il faudra impérativement mettre la jeune femme guinéenne au cœur des  priorités de  l’Etat, car celle-ci constitue à elle seule un indicateur de vulnérabilité notamment pour nos concitoyennes vivant dans le monde rural. 

La précarité dans laquelle évolue cette frange de la population est préoccupante au regard des dépenses de prestige qui engagent impunément nos dirigeants. 

Or, la jeune femme doit être un vecteur de développement en même temps que socle de la famille guinéenne. 

Toute politique de développement devrait faire de ce segment, un levier essentiel pour combattre et éradiquer la pauvreté et cela sera possible que par:

  • le renforcement de son autonomie financière, par la promotion de l’entrepreneuriat féminin dont la finalité sera de favoriser son insertion dans le circuit économique pour en faire un véritable moteur de la croissance ; 
  • l’accompagnement et l’encadrement des organisations de femmes en matière de formation ;
  • la promotion des structures financières décentralisées et la création d’une Banque des Femmes pour un accès plus facile au financement de leurs activités et projets. 

Ainsi on pourra inverser la courbe du taux d’emploi informel et de sous emplois, qui demeure encore trop fort en Guinée. 

SOURCE : AISSATOU CHÉRIF BALDÉ AVEC AFRICAN PANORAMA MAGASINE

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