Les marchés de gré à gré ou l’entente directe sous le régime du CNRD depuis septembre 2021 (SEKOU KOUNDOUNO)

Qui aurait cru, il y a de cela 24 mois, que les contrats de gré à gré ou par entente directe allaient être, dans la gestion de la commande publique, la règle et l’appel à la concurrence,   l’exception ?

Les faits donnent aujourd’hui raison à ceux qui s’étaient montrés sceptiques quant à la volonté de la junte d’améliorer la gouvernance et de moraliser la vie publique car, il s’avère que les prétendus « moralisateurs » sont plus tordus que leurs prédécesseurs, loin d’être des modèles comme en attestent les scandales à répétition révélés par les médias. 

Il serait fastidieux d’énumérer ici tous les marchés de gré à gré attribués aux  parents et amis des membres de la junte et/ou du gouvernement depuis le 05 septembre 2021. Pour asseoir nos propos sur une base, citons-en quelques-uns :

Les contrats de rénovation des ministères ;

La construction de garnisons militaires à hauteur de 200 millions de dollars US ;

Le bitumage de la route Kankan-Mandiana pour de 100 millions de dollars US ;

La construction des hôpitaux régionaux pour un total de 102 millions de dollars US contre un coût initial de 40 millions de dollars ;

La construction de la cité Camayenne ;

La rénovation du stade du 28 septembre ;

L’aménagement du palais présidentiel Mohammed 5 ;

La construction des quatre aérodromes régionaux ;

La construction des centres de santé améliorés ;

La construction du nouveau siège de la Caisse nationale de prévoyance sociale ;

Le bitumage des voiries urbaines de Conakry et de l’intérieur du pays ;

La rénovation du ministère des postes, des télécommunications et de l’économie numérique (85 milliards de GNF) ;

La rénovation de la résidence des premiers ministres (6 milliards de GNF). 

Le constat est sans appel : le recours systématique à une pratique censée être une rare exception est devenue aujourd’hui la règle en violation flagrante du Code des marchés publics.

Les auteurs de ces crimes économiques rivalisent d’imagination pour justifier l’injustifiable. Ils invoquent honteusement l’extrême urgence de construire, de rénover et d’équiper des  bâtiments administratifs, d’aménager et de bitumer les routes et, très souvent, la disponibilité de leur ami d’entrepreneur à préfinancer l’opération. 

Que la dépense soit inscrite dans le budget de l’Etat ou pas, comment peut-on s’engager dans la réalisation de ce genre d’investissement et  invoquer l’urgence pour attribuer le contrat à  un ami sans étude préalable et sans appel à la concurrence ?

Non seulement de telles pratiques violent une loi organique en l’occurrence le Code des marchés publics. Mais elles sont aussi un facteur de discrimination entre les entreprises. En choisissant l’entreprise du parent ou de l’ami, sans appel d’offres, les autres s’adjugent arbitrairement des marchés publics.

On  sait aussi que les marchés de gré à gré sont la préférence des cadres indélicats en raison des surfacturations qu’ils favorisent et qui multiplient indûment le coût des projets, des prestations ou des fournitures. Les surcoûts n’étant rien d’autre que les commissions à rétrocéder  aux ministres et à leurs collaborateurs. 

Ainsi, ces pratiques qui violent le Code des marchés, discriminent les opérateurs et favorisent l’enrichissement des décideurs sont légion actuellement dans notre pays.

SEKOU KOUNDOUNO, RESPONSABLE DES STRATÉGIES ET PLANIFICATION DU FND

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